Manipulations et passation (2)

Les manipulations s’enchaînent et ne se ressemblent pas, pour mon plus grand bonheur. Je me prépare à un grand moment, ma rencontre avec l'une des plus grandes colonies de manchots royaux des terres australes...


Après ce périple à Molloy et un retour de courte durée à PAF, nous voilà reparti pour un plus grand transit en direction de la côte Est de Kerguelen vers le site de Ratmanoff. En ce 14 Décembre, nous sommes 5, les sacs chargés, les bâtons de marche affûtés et "les barres de manip" en poche (barres énergétiques préparées par « Jéjé le pâteux » = le boulanger), on met le cap sur les roches jumelles, la première étape du transit. Pour cette dernière, il a fallu traverser 2 rivières : la rivière du Château et la rivière Norvégienne. Deux gros obstacles pouvant se montrer infranchissables en cas d'importante pluviométrie et/ou fonte des neiges. Malgré des conditions plus que favorables ce jour-ci, il est important de prendre ses précautions au moment de les franchir : se servir de ses bâtons de marche pour de meilleurs appuis et une meilleure stabilité face au débit mais aussi et surtout détacher les sangles abdominales des sacs à dos.


C'est parti pour le transit ! @Kevin LF

Environ 25 km nous séparent de la cabane Manchot à Ratmanoff. La fin du transit est rendue difficile par le fait que nous portons des bottes, et que nous sommes encore en phase d’apprentissage. Le port des bottes pour les transits est en effet recommandé à cause des rivières et souilles présentes sur notre route.
6h30 après notre départ nous arrivons enfin à la cabane. La joie de retirer le poids qui a tiraillé notre dos durant tout ce temps précède un repos bien mérité et propice pour soigner les quelques ampoules générées.


La vision de la cabane devant une "mer" de manchots est assez surréaliste @Kevin LF

La faune est diverse à Ratmanoff / Un albatros géant @Kevin LF

Après inspection de la cabane, choix des lits, mise en fonctionnement des arrivées d’eau et vérification des contenus des différentes touques, la décision est prise de rendre visite à nos quelques 200 000 voisins. Ils ne sont qu’à 1 km de notre cabane en bord de plage. Il n’est pas seulement question des manchots royaux mais aussi du Grand Albatros, du Pétrel Géant, du Skua mais aussi des indémodables éléphants de mer. Cette première vision sur la manchottière est assez impressionnante et revêt une réalité toute particulière: « nous y sommes, tout ce que possède notre imaginaire sur les Subantarctiques se trouve en ce moment même devant nous ». Un autre constat réside dans le fait qu’après notre transit sans relief à l’horizon, cette fois-ci celui-ci est composé de manchots et que le calme qui nous a accompagné durant toutes ces heures précédentes, fait désormais place aux multiples cris émanant de la colonie. L’heure tardive ne nous permet qu’un petit tour par la cabane « Guetteur » (en partie utilisée par les manchologues) et la partie Sud de la manchottière. Le temps de pleinement prendre conscience de l’instant et de réaliser quelques clichés.


La Bretagne encore et toujours présente @Maud QUEROUE

La curiosité de la faune prête constamment à sourire @Maud QUEROUE

Le lendemain, après une nuit revitalisante suite aux trajets et les dernières images en tête de la veille, il est maintenant temps de se remettre au travail. Comme pour Molloy, plusieurs mares à proximité de la cabane nous attendent. Après quelques échantillonnages et plusieurs mesures de tout type, nous voilà rendu à l'heure de midi. Surprise à l’intérieur de la cabane, 3 personnes nous y attendent. Et non, ce ne sont pas des manchots entrés en toute discrétion mais 3 collègues ayant entamés un petit tour de la Péninsule Courbet quelques jours plus tôt. Ils en sont à leur dernière étape avec Ratmanoff. La cabane « Manchot » pouvant accueillir 8 personnes, c’est un plaisir de les retrouver dans notre éphémère demeure. Pas facile cependant de s’activer pour la préparation du repas quand nous sommes aussi nombreux. Certains vont donc pêcher dans la rivière jouxtant la cabane, d’autres préparent la table quand une autre partie s’affairent à la préparation d’un petit apéro et du menu de cet après-midi. C’est toujours un plaisir de manger en cabane, surtout que le choix des vivres est conséquent et qu’il existe toujours une place dans nos sacs pour y glisser des petits plaisirs culinaires.


Rapide aperçu de l’intérieur de la cabane @Kevin LF

Passage obligatoire, le selfie dans la colonie @Kevin LF

Le repas à peine avalé que nous renfilons bottes, vestes et pantalons imperméables pour terminer la manip’ commencée en matinée. Il reste 2 mares à analyser pour notre protocole végétation aquatique. Ceci est réalisé assez rapidement. Nous sommes toujours en début d’après-midi et n’avons pas besoin de se concerter pour savoir quelle sera notre destination pour les prochaines heures. Petit passage à la cabane, où une sieste aurait pu nous y attendre, et direction vers la plage. Non pas pour s’y prélasser mais plutôt pour y contempler ceux qui s’y prélassent actuellement. Nous décidons d’aller visiter le Nord de la plage cette fois-ci. Là encore, la vision de la veille se confirme, l’horizon est fait de manchots ! Leurs cris nous accompagnent durant notre petite balade où beaucoup se montrent curieux de notre présence. Ce sont surtout les jeunes, le duvet marron juvénile toujours présent, qui font les premiers pas en notre direction. Les skuas ne sont jamais bien loin non plus. Le noir du sable tranche avec le marron des poussins, le blanc, jaune-orange et gris bleuté des adultes manchots. On a la sensation d’être bien accueilli par la colonie, peut-être restent-ils indifférents à notre présence ou bien en ont-ils l’habitude et qu’ils ne nous voient pas comme d’éventuels prédateurs. 


Un peu d'ordre militaire dans ce joyeux bordel @Maud QUEROUE


La nature, sa beauté et sa cruauté... @Kevin LF

Les mots sont difficiles à trouver pour relater cette expérience et d’ailleurs nous n’en avons pas beaucoup émis entre nous durant cette visite. Nos visages et expressions en diront beaucoup plus sur cela. En bonus, un petit florilège des plus belles mues aperçues, certains sont en condition fashion-week...


Le passage au plumage adulte ne se fait pas sans style pour certains manchots @Kevin LF

Les dernières traces de duvet prêtent à sourire @Kevin LF

En ce jour du 16 Décembre, après nettoyage de la cabane, nous remettons le cap sur PAF. C’est à nouveau 25 km qui nous attendent. Les pierriers, souilles et zones de sol meubles seront nos seuls obstacles. La météo reste très favorable comme à l’aller. Seul facteur changeant : notre nombre. On est 8 cette fois-ci et c’est à moi, passation oblige, de gérer notre cap grâce au tracé GPS. Le suspens est de mise... Nous avons bien atteint notre objectif après plus de 7h de transit. Les petits bobos et la fatigue générés par les transits précédents (surtout pour nos 3 vaillants camarades qui affichaient une centaine de kilomètres au compteur depuis leur départ de la base) expliquent une vitesse de déplacement moins importante qu’à l’aller. Ici, nous sommes en moyenne entre 2 et 3 km/h du fait des conditions de terrain et climatiques. Les derniers kilomètres sont très très longs surtout que nous apercevons les bâtiments des agences spatiales et météo au loin. La distance qui nous sépare de ces derniers ne semblait pas s’amenuiser. Arrivé sur base, il faut penser à mettre nos échantillons de mares au frais avant de regagner nos bâtiments et douches. Demain, ce sera le passage obligatoire au Biomar qui nous attendra pour travailler sur les échantillons et mettre les données collectées au propre. Pendant ce temps-là, le Marion Dufresne est à Crozet et met cap sur Kerguelen pour l’OP4...


Un dernier coup d’œil à la colonie de Ratmanoff @Kevin LF


Photo souvenir où le bonheur prime sur la fatigue @Kevin LF

Commentaires

  1. Un petit bonjour à kevin de la part de la famille prud'homm de penvenan. On suit régulièrement son blog depuis son départ. Tout à l'air de bien se passer et c'est l'essentiel. Son aventure va lui permettre de vivre une expérience inoubliable et très riche en connaissances. Il est un témoin privilégié d'une faune et d'une flaure exceptionnelle que très peu de gens auront eu la chance de voir d'aussi près. Qu'il en profite bien et qu'il prenne bien soin de lui. Meilleurs voeux pour cette année qui devrait être classée au rang de grand cru. Bisous à lui et bon courage. On est de tout coeur à ses côtés et fier de lui. Il digne de représenter sa Bretagne natale.

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